Joan Fontaine soupçonne son mari Cary Grant de vouloir la tuer. Oui, nous sommes bien chez Hitchcock qui joue avec les nerfs des spectateurs pour leur faire croire presque n’importe quoi. Le début est plutôt classique, même assez romantique: une jeune femme timide rencontre le journaliste séducteur Johnnie. Comme un conte de fées, ils tombent amoureux et Lina se marie avec lui. Sauf que voilà, celle-ci commence à désenchanter lors de leur retour de lune de miel. Elle découvre que Johnnie n’a pas d’argent, qu’il n’hésite pas à lui mentir et à voler, et qu’il adore le jeu. S’échaffaude dans sa tête la possibilité que son mari voudrait la tuer pour avoir son argent. Le film avance selon la progression des soupçons de Lina: petit à petit, par des petits détails ou des coïncidences, nous aussi en venons à avoir le doute. En dehors de la scène du verre de lait (devenue un classique à elle toute seule), Soupçons est un film brillamment orchestré par le maître, où la musique accentue le malaise et le suspense. La jolie Joan Fontaine joue une ingénue naïve mais superbe (on la retrouvera dans le très gothique et romantique Rebecca, de Hitchcock) face à un des acteurs fétiches du cinéaste, le charmant Cary Grant. Film d’ambiance, de mise en scène et d’acteurs, Hitchcock montre ce qu’est le génie. Il s’amuse avec un grand plaisir pas du tout coupable à nous malmener pendant 1h30. La fin en est presque décevante, un peu trop rapide et convenable. Mais le plaisir, lui, est toujours là.