Une éducation

Rosamund Pike et Carey Mulligan. Metropolitan FilmExport

Carey Mulligan et Peter Sarsgaard. Metropolitan FilmExport

La jeune Jenny, 16 ans, lycéenne studieuse, attend sous la pluie. David passe et la ramène en voiture chez elle. David qui a deux fois son âge, charmeur professionnel, et qui va lui offrir un monde qu’elle ne connaissait pas, auquel elle rêvait dans sa chambre mais n’aurait pas osé vivre. Il est tout ce qu’elle n’est pas, tout ce qu’elle ne vit pas.

Il est question donc dans Une éducation de Lone Scherfig du passage à l’âge adulte à travers la relation de Jenny avec cet homme plus âgé, mais également d’une foule d’autre chose: critique sociale (le père qui ne pense qu’à l’argent, les juifs), critique des parents, qui ici n’ont pas su protéger leur fille, tout aussi séduits et embobinés qu’elle par David (et qui retournent leur veste avec une rapidité déconcertante), et également critique de la condition des femmes (qui même en étant cultivées ne peuvent totalement s’affranchir). La grande force de ce ravissant portrait d’adolescente (que l’on voit devenir une femme au fur et à mesure du film) réside dans son scénario, signé Nick Hornby, à la fois tendre et cruel. Les choix de Jenny l’emmènent sur un chemin différent, loin d’Oxford, où elle se libérera de son éducation jusqu’à alors étouffante (les parents qui la poussent à étudier et à réviser sans relâche) mais se heurtera aux désillusions de la vie adulte. Pour mieux comprendre qu’elle n’est pas prête ("I feel old, but not very wise" dit Jenny vers la fin du film).
Carey Mulligan éblouissante, au destin plus que prometteur, campe une Jenny femme-enfant, un peu perdue et séduite par David, mais surtout par la vie qu’il lui promet et dont elle a toujours rêvé (musique française, concerts, Paris, œuvres d’art…). C’est bien la naissance d’une star. Peter Sarsgaard, charmant et séduisant, laisse planer une certaine ambiguïté tout le long du film. Jusqu’au seconds rôles, le film reste élégant: Emma Thompson, Alfred Molina, Rosamund Pike (en charmante idiote), Dominic Cooper, Sally Hawkins et Olivia Williams. Mais il faut l’avouer, la seule vraie star du film, c’est Carey Mulligan, qui remporte tous les suffrages (une nomination aux Oscars). Pour finir, la mise en scène est peut-être un peu trop classique et la fin un peu trop conventionnelle (parti pris de l’école et des études comme seul affranchissement). Mais cela ne gâche pas le plaisir de cette jolie surprise.

Comédie dramatique pleine de vie et d’esprit, aux dialogues qui font mouche et à l’héroïne craquante, Une éducation est la révélation d’une actrice (Carey Mulligan) et un vrai bol d’air frais d’1h35. Jolie réussite.

Metropolitan FilmExport

 

4 thoughts on “Une éducation

  1. Plus qu’une chronique sentimentale, une critique de la condition féminine au début des années 1960. Ainsi, une jeune fille de cette époque, en cas d’échec dans son cursus, n’a d’autre alternative possible que de faire un bon mariage. Et face aux avantages (apparents) que présente David (Peter Sarsgaard), les parents de Jenny accepte ce parti, malgré son caractère choquant, en raison de l’importante différence d’âge. La réalisatrice capture également avec justesse le désir de liberté et d’épanouissement qui caractérise le difficile passage à l’âge adulte. Mais le discours un peu moralisateur de la fin du film affadit le propos de Lone Scherfig. C’est d’autant plus regrettable que le casting est parfait, en particulier Carey Mulligan, en course pour l’Oscar de la meilleure actrice. Il est aussi dommage que le personnage du professeur ne soit pas davantage développé. On ressent comme une ambiguité dans sa manière de considérer la jeune fille, dans cette sorte d’admiration qu’elle éprouve pour elle.

  2. Je suis à peu de choses près d’accord avec toi. Mais pour moi il ne s’agit pas d’une banale et énième réflexion sur le passage à l’âge adulte, et sur les relations de parents à enfants, etc…

    Pour moi il y a une intéressante approche de ce sur quoi je me questionne moi-même beaucoup. A quoi servent les études ? Servent-elles vraiment à vivre notre vie, ont-elles un but ? Pourquoi étudier si ce n’est ne rien exploiter de ce que l’on nous enseigne, si cela signifie ne pas profiter ?

    Il faut selon moi distinguer le moyen de la fin. Les études ne doivent rester que des moyens pour vivre, et non une fin en soi, c’est aussi cela qui est mis en relief dans le film.

    J’écris en ce moment ma critique sur ce film, je serais un peu plus précis dans cette critique je pense.

  3. Je suis tout à fait d’accord avec ta critique. J’ai trouvé l’actrice vraiment très bonne. Je partage ta réserve sur la toute fin qui m’a déçue. En plus je trouve que le film se bonifie après sa vision, plus le temps passe, ce qui n’est pas toujours le cas.

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