Robin des Bois

Russell Crowe et Cate Blanchett. Universal Pictures International France

Scott Grimes, Kevin Durand, Russell Crowe et Alan Doyle. Universal Pictures International France

Robin des Bois est sans nul doute un des personnages les plus cinégiques du cinéma. Celui-ci a été incarné au tout début par Douglas Fairbanks, puis un Errol Flynn en collants qui séduisait la jolie Olivia de Havilland; au début des années 90, après plusieurs dizaines d’adaptations, c’est Kevin Costner qui a pris l’arc et a défendu les pauvres dans sa version la plus connue. On se souvient également de la série de 1997, Les Nouvelles aventures de Robin des Bois, avec Matthew Porretta, qui a rythmé mon enfance (et a fait de moi une fervente admiratrice du personnage), ainsi que de la dernière en date (2006-2009) diffusée sur la BBC avec Jonas Armstrong.
Bref, beaucoup ont enfilé le costume de Robin et pris les armes pour défier le Prince Jean. Russell Crowe n’est donc que le dernier d’une longue liste, mais reste pourtant un des meilleurs interprètes de la légende, à mon goût, apportant une certaine fragilité au célèbre archer. L’interprète de Gladiator rejoint donc son ami Ridley Scott pour dépoussiérer tout ça et faire leur Robin des Bois à eux. Soit un Robin différent de ce qu’on a pu voir avant: celui-ci s’appelle Longstride, n’est qu’un humble archer et suite à la mort du roi Richard Cœur-de-lion au début du film, fuit jusqu’à Notthingham. Ce Robin Hood est donc une sorte de prequel, se déroulant avant que Robin devienne le hors-la-loi caché dans la forêt. Le divertissement est de qualité, le souffle épique, du moins la première heure. Si le début est tendu et accroche, le souffle se perd lorsque Robin rencontre Marianne (Cate Blanchett). La romance est plus que prévisible et l’intrigue devient légèrement ridicule (Robin qui se fait passer pour le fils de Loxley). Le film devient alors plus conventionnel, les complots se dessinent, les français sont bien malmenés…Une baisse de régime qu’y est en partie dû au fait que Scott laisse en chemin Petit Jean, frère Tuck, Will Scarlett et les autres, qu’on voit peu dans la deuxième partie du film. La vérité est qu’on a plus vraiment l’impression de voir un film sur Robin des Bois, mais plutôt un film historique sur la guerre entre français et anglais. Certes, cela fait partie du paysage de la légende Robin Hood, mais Ridley Scott perd un peu l’essentiel en route.
On se souviendra néanmoins de la reconstitution, bien faite, des couleurs sombres de la photographie et du côté violent et réaliste que Ridley Scott met en avant. Le contexte est sombre: la misère des paysans, les taxes trop lourdes, la famine, les hommes à la guerre…Une noirceur bienvenue qui s’estompe au fil du film, jusqu’à disparaître complètement dans les dernières images très gnan-gnan. Sinon, du côté des "méchants", c’est quand même le top: Oscar Isaac, très charismatique en roi Jean, fou et versatile, Mark Strong, décidément habitué aux rôles de méchants bien bourrins, et Matthew MacFayden en shériff, qu’on voit peu malheureusement et qui aurait dû avoir plus d’épaisseur.

Courage, honneur et loyauté sont les maîtres mots de ce Robin des Bois version 2010. Ridley Scott livre un film intense qui n’arrive pas à garder son souffle jusqu’à la fin – dommage – mais qui brosse un portrait plus réaliste et noir de Robin Hood. Et Oscar Isaac est excellent en roi Jean, qu’on se le dise. Sinon, c’est quand la suite?

Universal Pictures International France


One thought on “Robin des Bois

  1. Ridley Scott nous propose ici un Robin des Bois d’avant la légende, ancré dans un cadre plus historique (du moins est-ce l’ambition du cinéaste) que ses prédécesseurs. Le début du film nous montre ainsi Robin Longstride participant au siège du château de Châlus-Chabrol (1199), au cours duquel Richard Coeur de Lion perdit la vie, frappé par un carreau d’arbalète.

    La suite du film s’intègre (avec plus ou moins de fidélité à la réalité) dans le contexte de crise politique de l’Angleterre du début du XIIIème siècle. Le père de Robin devient ainsi l’un des inspirateurs de la Magna carta libertatum, charte affirmant le droit à la liberté individuelle, arrachée par le baronnage anglais au roi Jean sans Terre en 1215, après une guerre civile marquée par la prise de Londres par les rebelles. L’on verra ensuite Robin, un temps rallié à Jean, repousser le débarquement d’une armée d’invasion française emmenée par Philippe Auguste. Mais la dénonciation par le roi Jean de la Grande charte marquera finalement l’entrée en rébellion de Robin. C’est le début de la légende…

    Cette nouvelle mouture se démarque donc fortement des versions qui l’ont précédée, d’où sa raison d’être. Elle bénéficie en outre du savoir-faire de Ridley Scott, toujours efficace lorsqu’il s’agit de diriger des scènes d’action (à cet égard, on retiendra la spectaculaire séquence du D-Day médiéval, pour reprendre l’expression du journal Le Point), ainsi que des interprétations de Russell Crowe, dont la force tranquille impressionne, et de Cate Blanchett, qui confère au personnage de Marianne Loxley -sorte de Jeanne d’Arc anglaise- son élégance racée.

    Robin des Bois n’a cependant pas la puissance dramatique de Gladiator et se perd parfois dans les méandres d’un scénario très (trop ?) touffu. Il ne pouvait toutefois guère en être autrement, puisque les aventures de Robin couvrent 17 ans d’histoire anglaise ! Les libertés que Ridley Scott prend avec cette dernière peuvent par ailleurs agacer, surtout si l’on considère la prétention de l’auteur en la matière. Ainsi, ce ne fut pas Philippe Auguste, mais son fils Louis, futur Louis VIII, qui dirigea l’opération de débarquement sur les côtes de l’Angleterre. Qui plus est, victorieusement ! Le spectateur français pourra aussi s’irriter d’une certaine francophobie latente, qui trouve son expression non seulement dans la trahison de certains évènements montrant les Français comme des envahisseurs (alors que ce sont les barons anglais eux-mêmes qui offrirent la couronne à Louis), mais aussi dans le piètre traitement réservé aux acteurs français du film, notamment Léa Seydoux, qui campe une Isabelle d’Angoulême uniquement bonne à coucher avec Jean sans Terre.

    Malgré ces défauts, Robin des bois n’en constitue pas moins un agréable divertissement.

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