La surprise de la fin du mois d’avril vient d’Australie et tient en deux mots: Animal Kingdom. Plongée âpre et glaçante dans une famille australienne de gangsters, ce polar noir psychologique et tragique se pose en réussite. Si bien sûr on pense à Martin Scorsese et James Gray, entre autre, David Michôd, jeune cinéaste australien dont c’est le premier film, arrive à se détacher des modèles du genre pour créer son univers. Un univers sombre, violent, tendu, dans lequel les personnages se débattent pour survivre, prêts à tuer. C’est la loi du plus fort. Tuer avant de se faire tuer. C’est Josh (le jeune James Frecheville, violence contenue…jusqu’à l’explosion) qui sera notre porte d’entrée vers cet enfer destructeur, lorsqu’il débarque dans la famille de sa mère, décédée récemment d’une overdose. Soit une bande d’oncles criminels (Ben Mendelsohn, excellent en oncle terrifiant et violent) et une grand-mère inquiétante (grande Jacki Weaver) qui veille amoureusement sur ses petits telle une louve, mais capable de sortir ses griffes si l’on s’approche trop près. Josh, d’abord passif, observateur, devient acteur malgré lui au fur et à mesure que la toile familiale se délite, détruite par la police qui est à leur trousses (formidable Guy Pearce) et les haines qui rongent les curs de ses membres. Au milieu de ces tensions, le jeune homme un peu perdu et en retrait doit alors choisir son camp et assumer ses choix. Des choix qui le mèneront vers un dernier acte final, glaçant, implacable. Le film est plutôt lent, tout le contraire de ce qui se fait habituellement. Le réalisateur fait monter la pression, la tension, aidé d’une bande son formidable (par Antony Partos, le compositeur) qui prend aux tripes et nous plonge dans ce quotidien sombre. Pas d’esbroufes, mais de la sobriété même lorsque la violence sourde qui imprègne le film éclate sans frémir. Pas de parti pris, pas de jugements, juste les faits, et rien d’autre. Et une noirceur sans concession, aucune échappatoire en vue, aucune lumière pour ce film au constat sans espoir.
Une beau polar sur les liens du sang, maîtrisé de bout en bout, passionnant, puissant, bref une réussite. Et un nom à retenir d’urgence : David Michôd. Avec un accent sur le o, s’il vous plaît. On n’est pas près de l’oublier.