« Frank », quatrième film de Lenny Abrahamson, surprend pour plusieurs raisons. Tout d’abord parce que le héros,Frank, leader d’un groupe de musique indé expérimentale, porte une (grosse) tête en papier mâché (inspiré du vrai Chris Sievey qui créa le personnage de Frank Sidebottom). Ensuite, parce que le film est inclassable, n’est jamais ce que l’on croit qu’il est, passant de la comédie au drame, abordant les thèmes de la musique, de la difficulté d’être reconnu (et du besoin parfois maladif d’être reconnu comme une « star ») dans cette société qui broie l’humain, des illusions et de la désillusion, du droit à la différence.
Frank n’est pas vraiment le héros du film, même si celui porte son nom, et qu’il captive le public par son mystère (qu’y-a-t-il sous cette tête en papier mâché et surtout, pourquoi ? on suppose qu’il est complexé car il garde la tête sur lui même dans la douche). Lui et son groupe nous sont introduits par le regard de Jon (Domhnall Gleeson), qui devient le personnage pivot du long métrage : jeune homme musicien écrivant des chansons dans sa chambre, rêvant à la célébrité, qui, par un heureux concours de circonstances, devient clavier dans le groupe de Frank. Deux visions de la musique entrent alors en collision : celui de Jon, qui veut être connu en écrivant des tubes pop qui plaisent au public et celui du groupe de Frank, The Soronprfbs, qui ne cherche pas la reconnaissance de l’autre mais le plaisir de faire la musique, ici plutôt expérimentale.
C’est cette dualité que Lenny Abrahamson cherche à filmer. Lorsque les membres du groupe s’isolent à la campagne pour faire de la musique, un glissement se produit : on voit petit à petit Jon imposer sa vision de la musique aux autres, à l’aide de tweets et followers et de tensions avec Clara (Maggie Gyllenhaal) qui ne voit pas d’un bon oeil le rapprochement entre Frank et Jon. Jon ne comprend pas que Frank puisse faire de la musique sans forcément vouloir être écouté, reconnu par le grand public. A travers les tensions qui ne tardent pas à éclater entre les membres du groupes, « Frank » aligne doux moments de folie, rires, poésie, se perd aussi un peu en chemin, le rythme s’essoufflant.
Il faut saluer les épatants acteurs, notamment les méconnus Maggie Gyllenhaal et Scoot McNairy (excellent dans la très bonne série Halt and catch fire). Mais c’est surtout le duo de tête qui fait des étincelles : le jeune Domhnall Gleeson, qui a une belle carrière devant lui, et l’immense Michael Fassbender, qui réalise le défi de jouer sans son visage, en conservant son charisme sans faille.
« Frank » est un joli film, original bien qu’un peu lent et avec quelques coups de mou, qui manque malheureusement d’émotions pour nous toucher pleinement. Cela vaut tout de même de s’y arrêter !
Dvd reçu dans le cadre de l’opération Dvdtrafic par Cinetrafic
Frank de Lenny Abrahamson
Edité par KMBO Cinéma, sa page Facebook et son site officiel
Sortie du film en DVD et Blu-ray le 7 juillet
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