Les Malheurs de Sophie

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En tant qu’inconditionnelle de Christophe Honoré et Alex Beaupain, je n’ai pas hésité un instant à aller voir l’adaptation du cinéaste des romans de la Comtesse de Ségur, publié au 19e siècle. Les Malheurs de Sophie (et Les petites filles modèles) est un pilier de la littérature jeunesse, le bouquin que j’ai dû lire une dizaine de fois enfant. Apprendre que Christophe Honoré travaillait dessus m’avait pour le moins surprise, son cinéma étant aux antipodes des films destinés à la jeunesse, et pourtant son travail en tant qu’écrivain, notamment de romans pour enfants expliquait son intérêt pour la chose. Car le réalisateur français n’est pas que metteur en scène mais également écrivain. Publié notamment chez l’Ecole des Loisirs, il a écrit le très beau et reconnu Tout contre Léo ou encore J’élève ma poupée, Je ne suis pas une fille à papa, Torse Nu.. Je ne peux que vous inviter à jeter un œil à son travail.

Mais revenons à nos moutons, ou plutôt à notre Sophie. Rappelez-vous, Sophie est une petite fille, d’environ 6 ans, vivant avec sa mère, Mme de Réans, et son jeune cousin, Paul, dans une grande demeure en France. Celle-ci accumule les bêtises et sa bonne s’arrache les cheveux. Un jour, la famille de Réans décide de partir pour l’Amérique. Mais la traversée tourne au cauchemar quand le bateau sombre, emportant la mère de Sophie. Son père, ayant survécu, se remarie avec une horrible femme, Mme Fichini. Sophie connait peu après un autre malheur : son père décède de maladie. Un an plus tard, Sophie et sa belle-mère reviennent en France et retrouvent Mme de Fleurville et ses deux petites filles modèles.

Cette adaptation est une vraie merveille ! Christophe Honoré a attendu de longues années pour réaliser un film avec et pour les enfants, et il s’en tire avec les honneurs. Accessible au plus jeunes comme aux adultes, Les Malheurs de Sophie donne à voir un cinéma exigeant, passionnant, intelligent et beau. C’est assez rare pour le souligner. En effet, la production actuelle de films pour la jeunesse est plutôt navrante, et rarement un cinéaste ne leur offre un aussi beau cadeau. C’est un film résolument moderne qui serait un peu le cousin des films de François Truffaut. Les dialogues du texte original côtoie des scènes dans lesquelles les personnages s’adressent à la caméra. Les décors inspirés du ? sont parsemés d’animaux en dessin animé (crées par Benjamin Renner, l’auteur de la fantastique BD jeunesse « Le grand méchant renard » que je conseille à toutes et tous).

On est rapidement conquis par l’univers de Christophe Honoré, notamment grâce à Caroline Grant, la jeune interprète de Sophie. Pleine de vie, elle est un ouragan, détruisant tout sur son passage, qui nous séduit malgré tout rapidement. On sent que le réalisateur français a pris beaucoup de plaisir à filmer ces enfants, pleins d’entrain et de vivacité, de fraîcheur et d’innocence. Chez les adultes, on retrouve Anaïs Demoustiers en Mme de Fleurville, gracieuse et souriante et Muriel Robin en Mme Fichini aigrie et méchante. Quand à Mme de Réans, Honoré a eu la bonne idée de confier ce rôle à la magnifique Golshifteh Farahani, actrice iranienne habituée du cinéma français depuis quelques années (elle jouait il y a peu dans le premier long-métrage de Louis Garrel, Les Deux amis, dont Christophe Honoré avait co-écrit le scénario). Elle traverse la première partie du film avec mélancolie et douceur, apaisement et fragilité. Si la première partie du film est drôle et entraînante (et touchante à travers le personnage de la mère) avec une Sophie qui fait beaucoup de bêtises, la deuxième partie est beaucoup plus sombre. La petite fille découvre le deuil et va devoir grandir sous les coups et les méchants mots de Mme Fichini qui ne tolère aucun écart. Christophe Honoré n’édulcore pas le texte de la Comtesse de Ségur. Heureusement que tout cela finira bien ! Quelques mots sur la musique originale de Alex Beaupain, somptueuse. Le chanteur-compositeur a crée de très beaux morceaux ainsi que deux belles chansons interprétées par Golshifteh Farahani et Caroline Grant. Sa bande sonore participe vraiment à l’immersion dans l’univers des Malheurs de Sophie.

Drôle et émouvante, cette nouvelle adaptation des Malheurs de Sophie par Christophe Honoré est une vraie merveille, que je vous conseille de courir voir, seul(e) ou en famille.

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