Christophe Honoré revient avec une fresque (en)chantée ambitieuse sur l’amour des années 60 à aujourd’hui à travers le portrait de deux femmes: Madeleine (Ludivine Sagnier, pleine de vie et Catherine Deneuve, impériale) et sa fille, Véra (Chiara Mastroianni, superbe de délicatesse). Si la première est une femme légère qui se prostitue occasionnellement pour s’acheter des chaussures, la seconde, sa fille née d’un premier mariage, aura le coeur plus lourd car elle vivra un amour à sens unique qui la consumera. Deux époques (les sixties colorées, légères, alors que les années 2000 annoncent la mort, la tristesse), deux femmes mais la passion comme point commun. Madeleine ne cessera d’aimer son premier mari, Jaromil, un médecin serbe , et leur liaison (secrète) traversera les années malgré leur divorce et le remariage de Madeleine. Véra, elle, tombe amoureuse lors d’un passage à Londres d’un musicien américain homosexuel et ne voit pas ce qui crève pourtant les yeux (l’amour que lui porte Clément).
Les bien-aimés est en filiation directe avec Les Chansons d’amour, sorti en 2008, autre comédie musicale moins ample (Paris comme seul décor, une histoire qui se déroule sur un temps plutôt court) mais au souffle tout aussi intense et tragique. C.Honoré nous entraîne de Paris à Montréal en passant par Prague et Londres, alors que l’intrigue des Chansons d’amour était basée sur Paris. Le cinéaste n’hésite pas non plus à entremêler Histoire et histoire, même si les évènements historiques restent plutôt en retrait (la guerre, le 11 septembre, le sida…), en toile de fond de ces amours doux-amers. Dense, Les bien-aimés l’est. Un peu lent parfois, mais le tout traversait de fulgurances. Fulgurances qui nous sont offertes par Alex Beaupain, compositeur des BO des films d’Honoré, qui signe les scènes chantées du film. Chansons sublimes aux paroles d’une grande finesse, amusantes et touchantes qui arrivent à faire transparaître les émotions et sentiments multiples des personnages avec une grande tendresse et sans pathos.
Les thèmes phares de Christophe Honoré sont à nouveau présent dans cette fresque féminine: ménages à trois, homosexualité, deuil, famille, l’amour, sexe…Des thèmes pas très joyeux, mais que le réalisateur traite avec une jolie légereté qui tend à s’effacer néanmoins dans la dernière demi-heure. Un final bouleversant mais sobre, qui vient clore une oeuvre foisonnante qui se révèle, après coup, d’une grande mélancolie et tristesse. Le casting, génial, aligne la grande Catherine Deneuve et sa fille Chiara Mastroianni, Ludivine Sagnier, une habituée des films du cinéaste tout comme l’excellent Louis Garrel, très juste, Michel Delpech, le réalisateur Milos Forman, l’américain Paul Schneider (vu entre autre dans le magnifique Bright Star) et le séduisant Rasha Bukvic.
Malgré les étiquettes que certains aiment à lui coller, Christophe Honoré est loin d’être un sous-Demy et, film après film, il crée un univers particulier, le sien, qui résonne durablement dans le coeur (et les oreilles). En espérant qu’il soit enfin reconnu à la prochaine cérémonie des césars, mais ça c’est une autre histoire….
Ma note:
Je partage entièrement ton point de vue et c’est vrai que les Chiara Mastroianni en particulier pourrait être justement nommée aux Césars !